La motivation, ça se mérite

Il y a quelques années, quand mon employeur me présentait le prochain incentive, j’avais tendance à devenir ronchon. Au cours de ma carrière, j’ai travaillé pour certaines entreprises qui n’y connaissaient absolument rien en management. Dans ces boîtes old school, la DRH nous demandait de tout donner mais donnait très peu en compensation. Il fallait donc se donner à 100 % pendant un mois pour remporter en fin de compte un foutu panier garni. L’entreprise pour laquelle je travaille aujourd’hui semble heureusement avoir lu quelques articles sur le management. Et lorsqu’elle suscite un challenge commercial, la gratification est proportionnelle à l’effort exigé. Et ça, ça change tout. Du coup, c’est avec le sourire que je reçois le prochain challenge commercial, et je me donne à 200 %. C’est comme ça que j’ai déjà gagné une tablette tactile, un vélo, des places de ciné (il s’agissait là d’un court challenge)… Si je me réjouissais déjà de ce quatorzième mois, le mois dernier, j’ai toutefois décroché la timbale : un voyage d’une semaine en Inde ! Pourtant, au début, je dois avouer que je n’étais pas très chaud pour y participer. Quitte à choisir, j’aurais de loin préféré effectuer ce voyage avec ma chère et tendre. Parce que voyage avait lieu entre collègues, évidemment (histoire de renforcer la cohésion des équipes, ce genre de choses). Le concept me dérangeait un peu. Voyager avec ses collègues, ce n’est pas tout à fait du boulot, mais c’est quand même loin d’être des vacances. On ne se conduit pas de la même manière au travail et on se comporte à la maison. Il faut jouer un rôle, celui du type qui se détend parce que c’est ce qu’il est supposé faire, mais tout en faisant quand même attention à ses agissements, car les collègues sont à portée d’oreilles. Du moins, c’est ce que je croyais. Parce qu’une fois sur place, je me suis surtout rendu compte qu’une virée entre mecs, ça permet aussi d’être naturel. Quoique d’un naturel très différent de celui qu’on a avec sa femme. J’ai eu mal au crâne au cours de ce voyage, challenge commercial mais ça fait tout de même un bien fou. Je craignais un peu que les activités qu’on nous réserve sur place aient autant de goût qu’un plat à réchauffer. Vous avez déjà sans doute dû supporter une telle scène : vous vous retrouvez dans une activité où vous avez l’impression d’être du bétail touristique. J’ai déjà eu l’occasion de vivre ce genre de moment lors d’un voyage avec ma femme, et ça ne m’a vraiment pas plu. Mais la DRH a, là aussi, su s’en sortir avec les honneurs : c’est une agence événementielle qui a tout organisé de bout en bout, et nous a concocté un séjour vraiment authentique. Si ce dernier était au final assez riche, ça a été un vrai bonheur : il ne s’agissait pas d’un séjour touristique (le colon venant s’amuser chez les indigènes), mais d’un séjour authentique où nous avons non seulement découvert la culture locale mais également échangé avec les habitants et les autres collègues. Je craignais surtout que les activités qu’on nous réserve sur place soient consternantes. Vous savez, le genre d’activité qui semble avoir été conçue par un moniteur de centre aéré qui n’a pas compris qu’il s’adressait à des adultes. Ma société a gagné sur les deux tableaux, sur ce coup-là : elle a fait des heureux parmi ses salariés grâce à un bonus, mais a surtout contribué à resserrer les liens entre ceux-ci. Depuis ce voyage, je me dis que je suis d’une certaine manière arrivé à destination. Il y a eu une période où je changeais souvent d’enseigne. Aujourd’hui, je me surprends à ne même plus de quelle couleur est l’herbe du voisin. Et vous savez quoi ? Ca fait du bien, de se sentir posé.

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